Nous croyions avoir vu ce qu’il y avait de plus beau en Ouzbékistan en quittant Boukhara. C’était oublier Samarcande où les travaux de rénovation redonnent tout leur lustre aux imposants monuments hérités du règne de Tamerlan. Les bouleversements de l’histoire et les tremblements de terre leur avaient en effet infligé de très graves dommages comme en témoigne cette photo de la mosquée Bibi Khanoum. On peut encore monter sur la colline au nord de la vieille ville pour tenter d’y retrouver les restes de la cité antique d’Afrosyab que les Grecs baptisèrent Maracanda, mais qui fut complètement détruite par les Mongols. Les objets récupérés lors des fouilles archéologiques sont présentés dans le musée d’Afrosyab. Dans ce musée, on peut aussi admirer une fresque datant du VII° siècle qui décorait à l’origine la salle de réception d’une résidence située non loin du musée. Elle représente un cortège d’ambassadeurs offrant des cadeaux au roi Varkhuman de Samarcande. Ce roi, en 655, avait envoyé une ambassade à la cour des Tang pour se déclarer vassal de l’Empire du Milieu. La scène montre, entre autres personnages, le chancelier de Tachkent, des Chinois apportant des fruits et des rouleaux de soie, des Coréens, des Turcs. Cette fresque très abîmée est accompagnée, de façon très pédagogique, d’un dessin qui reproduit et parfois complète la scène peinte. Ailleurs, l’impératrice de Chine se promène sur une barque, accompagnée de suivantes et de musiciennes. Ailleurs encore, voici une chasse au léopard. Et plus loin encore, une procession menant des animaux au sacrifice lors d’une cérémonie religieuse du culte zoroastrien.
À coup sûr, le roi Varkhuman avait su s’entourer d’artistes de talent !
Il ne faut pas manquer non plus d’aller voir la nécropole de Chakh-i-Zinda.
Cette nécropole, située au nord de la ville s’est constituée à partir du tombeau de Koussam, le cousin du Prophète Mahomet. Au début du XIV° siècle, les habitants venaient régulièrement y apporter des offrandes. Les successeurs de Timur décidèrent d’y bâtir eux aussi leurs mausolées. Oulougbeg, le prince astronome, fit construire le grand portique d’entrée. Ce portail franchi, on se trouve dans une sorte de rue comportant quarante marches appelée “l’escalier du Paradis”. Cette rue nous dirige vers le tombeau de Koussam, tout au bout du chemin. En cours de route, les mausolées se succèdent à droite et à gauche de la rue, tous plus beaux les uns que les autres. En voici quelques exemples :
-Le mausolée de l’émir Hussein, qui abrite peut-être la dépouille de la mère de ce général de Timur. -Le très beau mausolée de la nièce de Timur. On peut y lire l’inscription “Une perle précieuse a été perdue ici”.
-Le plus beau de tous, à mon avis, est celui qui lui fait face . Il a été construit en mémoire d’une sœur de Timur : Chirin Bika Ata.
Les mausolées se succèdent tout au long du chemin et on peut y admirer de nombreuses décorations, souvent calligraphiques. Cet endroit est certainement le lieu le plus sacré de Samarcande.
Nous voici à présent au cœur de la ville, Place du Reghistan. C’est une place carrée bordée sur trois côtés par une médersa et au centre jaillit une fontaine. À gauche, voici la médersa d’Oulougbeg, qui accueillait autrefois une centaine d’étudiants. Au-delà du portail d’entrée, On entre dans une cour carrée bordée de cellules sur deux étages. La tradition veut que le souverain lui-même ait enseigné l’astronomie dans cette école. En face, s’élève la médersa Tilla Kari. Des tourelles marquent ses angles et les mosaïques sont magnifiques. Et elle est surmontée d’un beau dôme turquoise.
Deux rangées de cellules sont ventilées par des fenêtres ajourées.
L’intérieur resplendit de décorations de toutes sortes, dans une harmonie de bleu et d’or… et les couloirs présent une enfilade de voûtes du plus bel effet. Enfin, à droite, voici la médersa Cher Dor. Le portail d’entrée est surmonté de mosaïques représentant des lions à la poursuite de biches fuyant parmi les fleurs. Ces lions ressemblent à des tigres et portent sur leur dos des soleils à visage humain… … ce qui valut à l’architecte d’être condamné à mort pour hérésie, puisque le Coran interdit toute représentation humaine.
Samarcande fut choisie comme capitale par Timur, plus connu en Occident sous le nom de Tamerlan. Cet infatigable conquérant la couvrit de monuments magnifiques et y développa un commerce très actif. La ville devint un véritable mythe.
Pendant l’une de ses expéditions lointaines vers l’Inde, sa femme préférée, Bibi Khanoum, décida de construire en son honneur une immense mosquée. On raconte que l’architecte chargé de ce travail exigea un baiser pour accepter de l’exécuter. Le résultat fut somptueux.
La mosquée Bibi Khanoum récemment restaurée est magnifique.
En voici l’entrée.
Elle est surmontée d’un beau dôme bleu turquoise…
… et flanquée d’un minaret.
La décoration intérieure est tout aussi réussie.
Malheureusement, lorsque Timur revint, il apprit ce qu’il prit pour une infidélité de son épouse. Oubliant qu’il s’agissait d’un cadeau somptueux, il entra dans une colère terrible. L’amoureux réussit à s’enfuir, mais l’épouse volage fut précipitée du haut du minaret.
On dit qu’il ordonna que les femmes de son pays, à partir de ce jour, se couvrent le visage d’un voile pour ne pas exciter le désir des autres hommes.
Timur avait souhaité reposer dans son village natal, mais sa dépouille se trouve au Gour Emir de Samarcande, sous un bloc de néphrite rapporté de Mongolie par son petit-fils Oulougbeg, le prince astronome.
Voici quelques aspects de ce beau monument.
Oui, décidément, le Gour Emir est un des plus beaux monuments de Samarcande.
Et oui, Samarcande est encore de nos jours une ville de légende !!!